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Introduction |
Chap 1 : Etude plastique, iconique et typographique |
Chap 2 : Etude psychologique |
Chap 3 : Etude sociologique |
Chap 4 : Etude culturelle |
Conclusion |
Ceci n'est qu'une proposition de rédaction et de mise en forme de la première partie du devoir de culture générale. Ce n'est en aucune façon la méthode une et unique qu'il faut employer lors de ce type de devoir. C'est un exemple et n'a de valeur qu'exemplaire. |
A la fin de tannée 2002. à l'approche des fêtes, Givenchy sortait dans la presse magazine féminine et masculine une annonce presse pour son dernier parfum, Givenchy pour homme. Cette communication commerciale est en même temps une communication réfèrent qui met en scène un message de complicité, il va en effet y avoir un déplacement de la nature du produit sur le consommateur, voire une fusion entre les deux. Les concurrents directs de Givenchy sur ce créneau étant entre autres Dior ou Cerruti qui ciblent tous les trois les hommes âgés de 30 ans au moins, il est à noter qu'à l'évidence les femmes seront prescriptrices. Il faut à Givenchy se positionner sur un secteur hautement concurrentiel à partir d'une mise en marché qui séduit le consommateur et l'incite à se rendre en parfumerie pour vérifier la senteur, puis acheter la produit s'il lui convient. C'est le plu souvent l'annonce publicitaire qui représente le premier contact qu'un consommateur aura avec son parfum. C'est pourquoi nous procéderons à la déconstruction ordonnée de cette annonce publicitaire en abordant tout d'abord les signifiants iconiques, plastiques et typographiques pour envisager ensuite les éléments psychologique, sociologique et culturel mis en œuvre par l'annonceur pour aboutir à l'acte d'achat.
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Pour commencer, la première chose qu'il faut ici relever est un sens de lecture verticale partant de la Marque Givenchy en haut du visuel pour se terminer en bas à gauche de 'annonce en zone de verrouillage avec le flacon en Rouge sur une photographie en noir et blanc. Cette lecture se fait donc en fonction de divers éléments qui, congruents forment une harmonie visuelle commençant par une jeune fille descendant d'une voiture de luxe, luxe ici lié a l'évidence au produit, contextuellement. Son regard, séducteur nécessairement, se tourne vers un homme au torse dénudé. Le fond de la photo est constitué d'une grille, un portail ouvert vers quelque chose, ce que peut apporter le produit peut-être. 1 .a promesse est ici mise en scène dans ce Jeu de séduction où les vêtements tombent, pas absolument dans un but sexuel mais ainsi que le slogan le dit, dans la cadre d'un comportement de gentleman, nous y reviendrons. Toutefois, le promesse qui est ici faite, c'est que l'homme va RE-devenir séducteur avec charme et élégance, à la façon des gentlemen. Cette demoiselle, pour ne pas se salir visiblement, s'est vue proposé par l'homme de le rejoindre en marchant sur sa chemise. La pluie présente sur la voiture est révélatrice de la délicatesse comportementale de l'homme prenant soin de madame. Pour contraster avec le sol sur lequel elle est posée, cette chemise est parfaitement blanche. La zone de verrouillage est constituée par la flacon qui est positionné sur les jambes de l'homme, dans un mouvement de continuité entre l'homme et le parfum qu'il porte, dans un mouvement presque identificatoire. ce dont nous parlions plus haut de transfusion entre le produit et le consommateur. Le flacon ressort parfaitement bien sur ce visuel en noir et blanc puisqu'il est représenté ainsi que le consommateur le trouvera dans les parfumeries : rouge. Ce rouge est symbole de passion, de sensualité, de séduction et cette couleur met le flacon en exergue sur un visuel ou les oppositions tonales et chromatiques permettent une reconnaissance immédiate du produit dans son packaging habituel ainsi que les règles de reconnaissance du produit le veulent. Cette publicité, nous l'avons vu, est une photo en noir et blanc, ces valeurs faisant appel à la mémoire, au souvenir d'une époque que l'on croyait révolue mais qui, selon le slogan, est de retour. L'effet du noir et blanc est aussi le réalisme, ce même réalisme que l'on trouve sur les photos de famille ou les films noirs des années 50. Il ne faut pas oublier que Pierre Bourdieu accordait à ces photos une fonction phatique, reprenant les termes de Jakobson dans son schéma de la communication. Cette photo, de plus, est à fond perdu, c'est-à-dire sans marge. C'est une invitation pour le consommateur à pénétrer dans l'image ; le cadre, l’espace, sont ouverts. Cet espace est visualisé en plusieurs plans : l'homme en gros plan de 3/4 dos, et au second plan, mais elle entièrement visible : le femme sortant du véhicule. L'ouverture est donc ici duelle : le portail en fond et le visuel non limité par une bordure marginale. L'orientation du regard détermine le sens de lecture mais aussi l'ouverture de l'espace du visuel, en forme de promesse d'avenir. Ce noir et blanc se retrouve aussi dans le choix typographiques puisque tous les textuels sont en blanc. Ces textes blancs pour reprendre Kandinski, « c'est un silence plein de possibilités. Le blanc sonne comme un silence qui pourrait subitement être compris ». La promesse ? C'est à l'évidence le cas si l'on tient compte des jeux de regards de le jeune fille qui a obtenu du jeune homme que son comportement soit celui qu'elle escompte : celui d'un gentleman. On remarque un rythme quaternaire puisque quatre éléments textuels sont ici présents. Le premier d'entre eux, le plus aisément identifiable est sans aucun doute le nom du créateur : Givenchy au dessous duquel on trouve « Pour Homme » marquant la destination du produit et la cible. Ces deux éléments textuels sont en capitales et sont ceux-là même que l'on retrouve sur le flacon respectant ipso facto la charte graphique de Givenchy. Sous la jambe de la jeune fille se trouve, imprimée en bas de casse, une phrase classique commençant par une capitale et finissant par un point. Ce textuel semble être une prise de parole ; une bas de casse, c'est le ton de la parole prononcée par la demoiselle. Cette phrase est en anglais et traduite ainsi que le veut la loi Toubon, au dessus de la base Une. Le dernier élément textuel, si l'on suit toujours le sens de lecture se trouve justement dans cette base-line, en blanc sur fond noir, le faisant ainsi ressortir. Il s'agit de la caractérisation du produit : « le nouveau parfum », sans autre précision, il est le seul nouveau parfum, et excepte toute concurrence. Ce texte est en capitales, et ainsi que tous les autres éléments écrits de cette publicité, en fantaisies selon la classification de Thibaudeau. Le slogan en anglais utilise cette langue pour accentuer encore s'il en était besoin le rôle du gentleman, rôle stéréotypé du séducteur anglais. De plus il se démarque des autres textuels en ceci qu'il est en antique dans cette même classification de Thibaudeau. La charte graphique respectée, enfin, si elle ne dénote pas d'originalité, facilite la reconnaissance du créateur Givenchy. La répartition globale des éléments iconiques, plastiques et typographiques procède d'une harmonie visuelle et d'un équilibre sur ce visuel qui permet à l'œil de se poser où il faut, et de repérer les éléments essentiels de ce visuel que constituent la promesse avec ce couple aux allures galantes et le flacon essence et destination du désir de séduction.
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Cette harmonie visuelle est bien sûr complétée par un champ de références psychologiques, sociologiques et culturels qu'il convient de mettre en relation immédiate avec ce qui est le nœud de cette campagne Givenchy : le retour du gentleman. On sait, parce que nombre d'études l'ont montré, que le choix d'un parfum ne se fait plus au départ pour son odeur, mais à partir d'une mise en marché et d'une mise en scène visuelle que nous venons de voir. Cette mise en scène crée le besoin et l'envie d'achat, si l'on en croit le modèle AIDA. Pour ce faire, on va aller chercher ce qui est le plus profondément enfoui au sein de l'inconscient, c'est pourquoi, si l'on se réfère à la seconde topique freudienne, c'est ici à la fois au Moi et au Ça que l'on fait appel. Au Moi en ceci que la promesse est ici faite d'un homme qui retrouve une autre réalité dans ses actes, et au Ça parce qu'on décèle, de façon sous-jacente, une volonté d'érotisation du visuel mettant en scène un devenir pulsionnel et fantasmatique. Dans ce domaine sexuel, faire référence à la chaussure de la demoiselle posée sur la chemise, c'est évoquer le fétichisme qui y est associé,qui plus est lorsque l'on connaît le parallèle entre l'homme et sa chemise : là où le talon se pose se trouve la poitrine de l'homme, signe encore s'il en est de la domination de la femme sur l'homme, de la prééminence de ses fantasmes, et éventuellement d'une pointe, si l'on peut dire, de sado-masochisme, tel celui que l'on retrouve chez Léopold von Sacher-Masoch dans La Vénus à la fourrure. Tout cela corrélé, inconsciemment, peut aboutir à l'achat, et ce d'autant plus lorsque l'on remarque les motivations ici mises en oeuvre. Il s'agira, si l'on en croit H. Joannis d'une motivation hédoniste. En effet, les deux partenaires sont à la recherche du plaisir, qu'il soit celui du gentleman ou sexuel, mais c'est aussi une motivation oblative en ceci que la volonté de faire du bien de manière délicate et courtoise est présente chez l'homme. La sexualité se retrouve dans la classification de Dichter avec une tendance égoïste, la sexualité étant assez souvent liée à l'ego. Ceci correspond à la volonté d'accomplissement de soi (le couple s'accomplit, se réalise enfin avec cette fragrance) sur la pyramide de Maslow et pour Murray à un besoin de dominance parce que nouveau parfum de Givenchy accorde un pouvoir. Le pouvoir de séduire comme on le faisait il y a quelques décennies, la photo n'est pas en noir et blanc au hasard, nous avons d'ores et déjà abordé ce point.
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Justement, sociologiquement parlant, l'homme ici perd son rôle autocentré et égotiste de macho au profit de la dame et redevient le gentleman, ce qui est révélateur d'une nouvelle position de la femme dans la société. Elle se fait de plus en plus dominatrice (le terme est choisi à dessein) dans les postes à responsabilités et se réapproprié le pouvoir d'être séduite plutôt que dominée. L'homme est ici à ses pieds, de façon figurative puisqu'on remarque une analogie entre la position de l'homme et celle de la chemise : elle sont identiques, et le parfum le révèle en ceci que l'homme se soumet ici au désir de la femme en se montrant galant, courtois, etc. Nombre de codes sociaux entrent ici en ligne de compte : l'homme qui ouvre la portière de la voiture, qui pose sa chemise à terre, tout ceci fait partie de la gestuelle normée de la communication entre individus révélateur de politesse, de déférence. La proxémique est ici patente en ceci que l'homme se tient très en retrait pour laisser la place à la demoiselle signifiant d'une certaine inversion des valeurs masculin - féminin ainsi qu'on le retrouve développé dans certaines des nouvelles de J. Barbey d'Aurevilly. Le nouveau parfum est aussi un nouvel homme. La mise en scène sociologique diffère aussi de nombreuses publicités où sont présentes des automobiles, en ceci qu'ici la voiture n'est plus associée à la puissance virile de l'homme. De même pour le flacon : les parfums masculins sont habituellement présentés dans des flacons assez anguleux, or on note ici qu'il est en formes courbes, douées, sensuelles, ainsi que se doit d'être un homme galant.
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Cette forme de galanterie, de courtoisie prélude à l'amour pourrait être celle du fin'amor médiéval où par de nombreuses épreuves et un comportement très codifié on faisait tout pour plaire à la dame aimée. Associée à une voiture, cette courtoisie peut évoquer une manière de chevalerie des temps modernes. Le « gentleman is back » signifiant son retour, il ne fallait qu'une chose : que Givenchy le lui permettât, ce qui est chose faite avec ce parfum ; on pense alors à de nombreux films noirs des années 50 américains, français ou anglais où ce type de séducteur était très présent, notamment avec Cary Grant. On marque avec le noir et blanc et le slogan un retour à des valeurs qui avaient eu tendance à disparaître ; le produit s'ancre dans la temporalité pour l'image de l'homme et dans la modernité avec un flacon en couleur. Les oppositions chromatiques et tonales ici codifiées mettent en valeur la promesse. Givenchy pour homme refait de vous le séducteur qu'elle aime...
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A la lumière de ces éléments où l'on remarque une opposition entre couleurs et noir et blanc pour amener le consommateur dans un univers qui est de retour grâce à Givenchy, où l'homme se soumet beaucoup plus à la femme, où la séduction prévaut aux dépens de la sexualité, on remarque qu'à l'évidence Givenchy réalise une communication parfaitement cohérente entre textuels et procédés visuels amenant de facto une adéquation à la cible des hommes de 30 ans et plus. Nul doute que cette campagne de communication publicitaire amènera les hommes ciblés et les femmes prescriptrices dans les parfumeries puisque pour une fois, et c'est suffisamment rare pour être noté, on ne vend pas un parfum à l'aune d'un potentiel sexuel mais ici d'une séduction courtoise. Un effet pervers est à noter en ceci qu'on pourrait malgré tout ne voir là que la mise en scène d'un fantasme banal d'une volonté de rapport sexuel en voiture... ce qui ne correspondrait guère à l'image de Givenchy. Hormis cette réserve, associée à un spot télévisé clarifiant davantage encore ce visuel presse, cette campagne se mémorise aisément du fait de sa simplicité, de l'absence de confusion symbolique et d'une sobriété telle que l'a toujours souhaitée l'annonceur dans ses campagnes précédentes.
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